DANS LA PROFONDEUR DU SOUFFLE : DE L'ART ET LA MANIÈRE DE RESPIRER EN YOGA

 
 
 
 
 

« Le souffle, c'est le ciel, c'est ce qui met en communication, c'est le vent, c'est le mouvement, ce sont les transformations, c'est la respiration, c'est ce qui est léger et s’élève, ce qui s'envole, ce qui se disperse, ce qui ouvre, ce qui brille, c'est la lumière. Le souffle peut cacher l'ombre et contenir la forme ».

Texte anonyme extrait du Daozang.

Respirer, quoi de plus commun ?

Pourtant, l'air que nous inspirons et expirons - souvent sans en avoir conscience - peut nous aider à cheminer vers ce que nous sommes profondément et nous permettre d'accéder à de riches enseignements. C’est ainsi que dans les plus anciennes civilisations orientales, comme l’Inde ou la Chine, mais aussi dans les traditions Chrétienne ou Soufis, le corps ne se conjugue pas au singulier, séparé du reste, mais demeure en intime relation avec le souffle-énergie. Qu’on l’appelle prana en Inde, Qi en Chine, pneuma en Grèce, cette essence originelle a suscité une soif de connaissance et d’expérience inextinguible. Ainsi, on remarque que très tôt la respiration occupe une place particulière. Par son essence, elle nous relie à notre intériorité en même temps qu’elle nous ouvre à une dimension sacrée de notre être

Ainsi, la Chândogya Upanishad (texte sanskrit qui a servi de texte de base à l'école Vedanta de l'hindouisme), datée du 6e siècle environ avant notre ère, développe :  « de même qu’un oiseau, un fil à la patte, vole de-ci de-là, ne trouvant jamais où se réfugier, finalement se pose là-même où le fil est lié, de même notre pensée (manas) vole de-ci de-là, et ne trouvant où se réfugier, finalement se pose sur le souffle-même (prâna), car c’est au souffle qu’elle est liée » (VI, VIII, 1-2). 

La maîtrise du souffle permet alors de stabiliser les pensées, entraînant des états de concentration, puis d’absorption, menant à des états méditatifs très profonds. Ainsi, si aujourd’hui ce qui semble faire le cœur du yoga contemporain mondialisé est la pratique des postures, c’est sans doute la pratique de pranayama qui était au cœur des yogas prémodernes. 

Que signifie alors le pranayama et en quoi cela consiste ?

Pranayama vient des termes sanskrits « prana », qui désigne le principe vital, le souffle-énergie et « yama » : la restriction, la maitrise. Pranayama signifie ainsi la maîtrise (plus que le contrôle) du souffle, mais également sa suspension.

La respiration, une fois apprivoisée, agit comme un principe unificateur, c’est-à-dire qu’elle participe à relier les différentes dimensions de notre être, de notre corps physique à notre corps le plus subtile. Se rassembler, redevenir entier, c’est cela, la vertu majeur du souffle. Cela se produit par l’équilibre et la pacification de tous les systèmes du corps : nos émotions et tensions corporelles sont apaisées et le flux incessant des pensées peut se calmer. De cette manière la respiration est un acte de retour vers soi-même, un antidote à la distraction et à l’oubli de soi. Se poser en soi et demeurer dans la confidence du souffle éclaircit les facultés de discernement en apportant plus de clarté et de transparence. Par là même, l’état de concentration et de vigilance, nécessaire pour calmer les agitations du mental et accroître la capacité d'attention sur un seul objet à la fois, s’en trouve nettement amélioré. Cette qualité nous permet de devenir plus entiers et présents au monde et à nous-mêmes. 

Dans un premier temps , il convient d’« agir » en douceur sur la respiration, au travers de diverses techniques nous permettant d’affiner, d’affûter le souffle. Puis, à mesure que l’aisance respiratoire et la confiance apparaissent, l’invitation est d’une tout autre teneur. Il s’agit alors de se fondre dans la profondeur organique du souffle. Passer de l’ « agir » au « non-agir » et percevoir cette énergie créatrice inouïe qui met en lumière la vie universelle qui vibre en chacun de nous.

Quels sont les bienfaits du pranayama ?

Ainsi la pratique du pranayama est essentielle pour compléter le travail postural, l’une ne devrait pas aller sans l’autre. Elle peut aussi se pratiquer indépendamment, car les bienfaits directs de cette pratique sont nombreux :

  • Désengorge et rééquilibre l'ensemble de l'appareil respiratoire

  • Participe au bon fonctionnement du cœur en modulant le rythme cardiaque 

  • Facilite la diffusion du sang artériel et le retour veineux

  • Facilite la digestion et permet une meilleur assimilation 

  • Favorise l'élimination des toxines et des tensions corporelles

  • Apaise et équilibre le système nerveux dans son ensemble par la stimulation du système parasympathique (le système de récupération du corps)

  • Allège les tensions du mental et favorise les facultés de discernement

  • Apaise les émotions

  • Développe la confiance, la stabilité et la sérénité